Les affiches vantant les mérites ou le confort d’une clinique ont fleuri ces dernières années à Shanghai, révélant la part grandissante du secteur privé dans le monde médical en Chine, mais surtout une approche de plus en plus commerciale de la santé. Un phénomène qui n’est pas sans poser de problèmes, la course au profit engendrant des situations parfois dangereuses pour les patients.

« J’ai ouvert mon propre hôpital car je sentais qu’il y avait un marché. La demande était là« , résume, avec un vocabulaire emprunt à l’économie, Zhang Shiwei, directeur de l’hôpital de Nanyang, dans le sud de Shanghai.
Ancien médecin, M. Zhang ne regrette pas la blouse qu’il a portée presque 20 ans. Il est aujourd’hui un homme d’affaires avant tout.
Mise décontractée et portable dernier cri toujours dans une main, il n’est pas mécontent de son établissement : un petit hôpital de 50 lits, perdu dans une ruelle d’un quartier résidentiel construit dans les années 90 et pour lequel il a de grandes ambitions.
« Nous sommes en négociation avec des investisseurs étrangers pour développer l’hôpital et l’internationaliser« , affirme-t-il.
Ouvert en 2002, cette clinique profite du désengagement progressif de l’Etat du secteur de la santé, où beaucoup d’entrepreneurs ou de médecins décident de lancer leur propre structure pour profiter de ce marché en pleine expansion.
« Les hôpitaux publics sont bondés. Les gens doivent faire la queue. Les patients aspirent à davantage de services aujourd’hui », estime M. Zhang.
« Nous avons besoin d’hôpitaux privés car le gouvernement n’a pas les moyens d’ouvrir de nouveaux hôpitaux alors que les besoins des patients grandissent toujours davantage« , explique de son côté Li Bing, médecin à l’hôpital public Changzheng à Nankin, à l’ouest de Shanghai.
Mais les établissements privés mettent parfois du temps à construire leur réputation. Le reproche porte sur leur approche trop commerciale, que certains faits divers viennent illustrer.
En novembre dernier, la presse shanghaienne a ainsi fait couler beaucoup d’encre sur le cas d’une patiente opérée à tort par une clinique. En deux jours, Mlle Wang a été privée de ses ovaires et payé 40.000 yuans (5.130 USD).
« La situation des hôpitaux privés est aujourd’hui un peu chaotique. Certains sont pressés d’arriver à l’équilibre alors que les hôpitaux publics sont davantage concentrés sur la qualité du service« , juge un médecin de Shanghai sous couvert de l’anonymat.
La situation ne s’améliore pas, dans un contexte de plus en plus concurrentiel.
« Au départ, nous n’avions quasiment pas de concurrents, aujourd’hui il y en a beaucoup plus« , reconnaît M. Zhang.
De fait, Shanghai comptait fin 2005 plus de 2.500 établissements privés, selon le Bureau de Santé de la plus grande ville de Chine, et l’une des plus riches.
Les hôpitaux ne sont pas les seuls à répondre à cette logique commerciale. Les entreprises pharmaceutiques chinoises font partie des plus dépensières en matière de publicité, selon Nielsen Media Research.
Devant l’exagération des effets vantés de certains médicaments, le gouvernement chinois a d’ailleurs resserré la réglementation de ces réclames en novembre dernier.
Avec un marché estimé à 640 milliards de yuans, l’industrie médicale a de quoi aiguiser les appétits.