Originaire du Nigéria, cela fait sept ans qu’Adam étudie à Pékin. Il parle chinois, a une petite amie locale et se dit « intégré autant qu’il peut l’être ». Néanmoins, sa famille reste africaine. Depuis deux ans, Adam est le capitaine du Africa United Football Club, une équipe d’amateurs qui réunit des joueurs venant des quatre coins de l’Afrique.

« Hé ! Avance Isaak, avance !« , le visage d’Adam est tendu. « Fais attention à ta droite ! Ta droite ! » Sa voix résonne dans ce parc de la capitale chinoise; ses mains sont mouillées de sueur. Il les passe sur son maillot rouge, saute d’un pied sur l’autre, dans un mouvement constant.
Il observe les autres joueurs devant lui, crie des instructions. C’est un match important. Le Sexy FC, le club des expatriés anglophones de Pékin, est un adversaire sérieux, même s’ils portent des maillots rose fluo.
Adam a 27 ans. Le Nigérian porte un brassard aux couleurs de son pays au dessus de son tricot. Depuis deux ans, il est le capitaine de Africa United FC, un club d’amateur qui réunit des Africains qui habitent Pékin autour d’un même intérêt – le football. Le FC est l’une des seules associations africaines de la capitale. Jouer à Africa United est un hobby, une passion.
Mais pour un grand nombre des joueurs, le club est également un lieu où ils peuvent passer du temps, et une famille. C’est le cas pour Adam qui est arrivé en Chine en 2003.
Depuis, le jeune homme étudie la géologie pétrolière dans une des universités les plus renommées dans ce domaine, l’Université de pétrole de Pékin. C’est son père qui lui avait proposé de faire ses études en Chine, dans un pays aussi loin du sien. « Il venait déjà à l’époque pour faire du business. Il m’a parlé des opportunités disponibles, du marché en croissance perpétuelle. Et même aujourd’hui, le potentiel reste énorme« , assure-t-il.
Entre la Chine et l’Afrique
A la fin de ses études, Adam veut devenir businessman, entreprendre entre l’Asie et l’Afrique, entre la Chine et le Nigeria. C’est l’un des pays les plus riches en pétrole et pour cette raison, il attise l’intérêt de l’empire du milieu. « La Chine a besoin de ressources naturelles, l’Afrique d’infrastructures et de savoir-faire. C’est une situation de besoin mutuel, pas du paternalisme« , explique le Nigérian.
Comme beaucoup d’Etats africains, le Nigeria entretient une relation économique intime avec la Chine. 8e exportateur de gaz et de pétrole au monde et deuxième partenaire économique africain de la Chine après l’Afrique du Sud, il a été envahi par des investissements chinois qui sont estimés pour l’instant de 4,3 milliards d’euros, selon les chiffres du Quotidien du Peuple.
En comparaison, d’après CNN, le chiffre d’affaire total de la Chine avec l’Afrique pourrait excéder les 110 milliards de dollars (78 milliards d’euros) cette année.
« Les entreprises chinoises peuvent concurrencer les sociétés pétrolières occidentales qui jouissent depuis des décennies des avantages des ressources de l’Afrique, ajoute Adam. Il ne faut jamais sous-estimer l’histoire. La relation du continent noir avec les pays occidentaux reste problématique. La Chine ne partage pas une telle histoire avec l’Afrique« .
Pourtant, à la fin des années 80, ce manque de partage avait mené à des violentes manifestations anti-africaines à Nankin, et on rapporte souvent des problèmes en Afrique entre les communautés d’ouvriers chinois et les locaux, notamment dans les pays du magrheb.
Mais aujourd’hui, Pékin est une ville de plus en plus cosmopolite. On y dénombre environ 110 000 résidents étrangers, soit un peu moins d’un pour-cent de la population. Et selon Adam, il y aurait entre 30 000 et 40 000 Africains dans la capitale chinoise.
Une intégration « à l’africaine »
Néanmoins, les Africains en Chine continuent à faire l’objet de discriminations. L’année dernière, par exemple, une jeune fille afro-chinoise qui avait participé à une sorte d’American Idol local « Oriental Angel » sur la chaine shanghaïenne Dragon TV avait subit des attaques racistes sur le web. Son cas avait lancé un large débat sur le racisme en Chine, qu’Adam qualifie plutôt d’ignorance.
« En 2004, un vieux paysan est venu vers moi et a touché ma peau. Il était juste curieux. Une telle chose ne m’est plus arrivé depuis. Aujourd’hui, parfois les chauffeurs de taxis refusent de conduire des blacks, je ne sais d’ailleurs pas pourquoi. Mais globalement, les choses se passent plutôt bien« .
Adam est un bon exemple d’une intégration « à l’africaine ». Il parle le chinois, côtoie des amis chinois et a une petite-amie chinoise. Mais comme c’est le cas dans la plupart d’expatriés sa famille vient d’ailleurs. Elle est africaine.
Sa famille, c’est ses potes du foot. « Ce sont des gens que tu connais, des gens qui ne parlent pas nécessairement la même langue que toi, parce qu’ils viennent des quatre coins de l’Afrique, mais ils te comprennent. Tu peux les appeler si t’en a besoin. C’est important. »
Et comme beaucoup d’expatriés, c’est entre les deux cultures qu’Adam voit son avenir. Entre l’Asie et l’Afrique, entre la Chine et le Nigeria, entre Pékin et Abuja.

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Bonjour,
Article très intéressant !
Une petite correction cependant, le mot « Shanghaioise » est incorrecte il faut dire Shanghaienne.
Cordialement,
Sinasia