Dans le nouveau numéro de Connexions, le magazine de la Chambre de Commerce et d’Industrie Française en Chine, consacré aux investissements chinois en France, un article présente la société chinoise Bluestar.

Dans le cadre de notre partenariat avec Connexions, voici un article du dossier de ce nouveau numéro.
1984, une poignée de jeunes cadres motivés, un prêt de 10 000 RMB et surtout une vision de long terme et des idées innovantes. Il ne s’agit pas des débuts rocambolesques d’un géant du IT dans la Silicone Valley californienne mais bien de la création de Bluestar à Lanzhou.
Près de trois décennies plus tard, Bluestar est devenu un groupe international implanté en France et en Norvège et le numéro 1 en Chine du nettoyage industriel et des nouveaux matériaux chimiques, entre autres.
Le Président actuel, Robert Lu, revient pour Connexions sur le développement
de son entreprise et son implantation en France.
Connexions : Quelles sont les grandes lignes de l’essor de Bluestar en Chine et de votre implantation à l’international ?
Robert Lu : A la base de la réussite de Bluestar, il y d’abord un homme, Ren Jianxin, qui à 26 ans et tout jeune membre d’un institut de recherche du ministère de l’Industrie chimique a fondé l’entreprise avec sept autres personnes.
Au départ, les associés se sont spécialisés dans le nettoyage des chaudières de centrales thermiques pour devenir dix ans plus tard un leader national des technologies de nettoyage industriel couvrant des secteurs aussi importants que l’énergie, le nucléaire ou l’aérospatial.
Ce succès était le résultat combiné d’un sens accru de l’innovation des fondateurs mais aussi d’un mode de management et d’un plan de développement original élaboré par Ren Jianxin.
Dans une Chine bien différente d’aujourd’hui, il avait déjà en tête une expansion multisectorielle dans l’industrie chimique et l’âme d’un véritable entrepreneur comme on l’entend en Occident.
C’est pour cela qu’en 1996, en pleine crise chinoise de restructuration des entreprises d’État, les autorités ont fait appel à Bluestar pour reprendre en main quatre sociétés mal en point.
Le choix a alors était fait de se spécialiser sur les nouveaux matériaux chimiques, les produits high-tech et le secteur de la silicone qui sont aujourd’hui des activités phares. Bluestar s’est ainsi développé en Chine jusqu’en 2005 à travers des opérations de fusions pour devenir un acteur comparable à des grands groupes étrangers du monde de l’industrie chimique.
C’est à cette même période que Ren Jianxin quitte la direction pour prendre la tête du groupe ChinaChem dont Bluestar devient une filiale. Il laisse un plan de développement sur 20 ans qui met l’accent sur l’internationalisation et la recherche de synergies avec des partenaires hors de Chine. C’est sur cette base que nous avons repris l’entreprise française Adisseo en 2006 puis la filiale silicone de Rhodia en 2007 et plus récemment les opérations silicone du groupe norvégien Elkem en ce début
2011.
C : Pourriez-vous nous donner plus de détails concernant vos implantations en France ? Qu’est ce qui a motivé ce choix de l’Hexagone ?
R. L. : Un des points fondamentaux dans le choix de partenaires français fut la relation forte et la collaboration technique qui existaient de longue date entre le ministère de l’Industrie chimique chinois et la France.
Dans les années 80, la Chine a cherché à se doter de capacités de production en méthionine, un acide aminé permettant de d’activer la croissance des animaux dans les élevages de volailles.
Après maintes difficultés, l’État a demandé à Bluestar de prendre en charge le projet et de trouver les partenaires adéquats. Nous étions à cette époque déjà en rapport avec Rhodia dans le secteur de la silicone et c’est eux qui nous ont présenté Adisseo, spécialiste des additifs et solutions nutritionnelles pour animaux.
L’idée de départ était d’établir une JV avec le Français qui était alors détenu par un fonds d’investissement privé londonien. Or, ce fonds préférait revendre en totalité l’entreprise française que nous avons donc rachetée au début 2006.
Pour nous, il s’agissait d’une grande première et d’une dépense très importante : 400 millions d’euros soit près du dizième de notre capital. Sans expérience, nous avons suivi scrupuleusement les pratiques internationales en termes d’audit financier, de ressources humaines et d’environnement légal. Cela nous a permis de bâtir des relations de confiance avec le management d’Adisseo qui perdurent jusqu’aujourd’hui.
Dans le cas du rachat de Rhodia Silicone, dès 2006 l’idée d’un partenariat avec le groupe français était sur le tapis. Or Rhodia voulait mettre en place avec nous une JV globale, un projet qui s’est avéré très compliqué à monter.
L’acquisition est alors apparue comme la meilleure solution et, sachant que Rhodia n’avait pas l’intention de reprendre Bluestar, nous avons finalement racheté la filiale de groupe français en 2007.
C : En France, l’arrivée d’entreprises chinoises comme la vôtre inquiète parfois. On parle souvent de transferts technologiques sans réciprocité et d’impacts négatifs sur l’emploi local. Quel est votre point de vue sur cette situation ?
R. L. : Nous sommes conscients de ce genre de difficultés mais le constat aujourd’hui c’est que, dans le cadre de nos activités, ces peurs ne sont pas justifiées. Dans le cas d’Adisseo, notre volonté de transfert technologique est évidente, c’est le but même de l’acquisition !
Mais en aucun cas l’idée a été de supprimer des emplois ou de fermer le site en France. Nous avons gardé le même management français car nous ne sommes pas capables de gérer au mieux une entreprise dans un environnement local très différent de la Chine. Comment discuter avec des syndicats très présents ? Comment être sûr de bien respecter un droit du travail nettement plus développé que le nôtre ?
Si à tout cela vous ajoutez les difficultés de communication liées à la langue, il devient évident qu’il faut garder en place une grande partie des structures existantes.
De plus, nous ne rachetons pas uniquement quelques brevets ou un stock d’équipements transférables mais avant tout des capacités d’innovation et de gestion, points fort de la France, et un réseau commercial bien établi.
Nous recherchons des synergies de long terme avec des partenaires étrangers et non pas la bonne affaire financière d’un jour.
Cinq ans après le rachat, Adisseo se porte très bien avec une croissance doublée et une profitabilité multipliée par 10 sans perte d’emplois drastique en France. Les dirigeants d’Adisseo participent aux prises de décisions non seulement sur leur secteur mais aussi plus globalement sur l’ensemble des activités du groupe.
Nous avons désormais des relations de partenaires prêts à apprendre les uns des autres pour avancer ensemble et pas une simple hiérarchie pyramidale entre propriétaires et employés. C’est très exactement ce que nous recherchions !
Dans un contexte international difficile lié à la crise financière de 2008 et sur un marché des matières premières peu propices, le bilan du rachat de Rhodia Silicone est plus mitigé pour le moment.
La même logique de synergie est cependant à l’oeuvre et je n’ai aucun doute que la situation s’améliorera très rapidement, sans doute dès l’année prochaine.
En tant que groupe chinois, nous sommes encore loin d’avoir rattrapé notre retard par rapport à des structures internationales, mais je n’ai aucun doute que nos acquisitions en France et ailleurs seront des accélérateurs pour rejoindre la cour des grands.
C’est un objectif commun qui, s’il est atteint, bénéficiera à tous nos employés, qu’ils soient en Chine ou ailleurs ! •
Retrouvez Connexions sur le site de la CCIFC
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J’ai arrêté de lire à la phrase :
« Le choix a alors était fait de se spécialiser sur les nouveaux matériaux chimiques, »
Apparemment, au CCIFC, le choix a été fait de ne pas respecter la grammaire…
les JV, les rachats de societes de nettoyage, travail anodin s’il en est, permettent surtout d’acceder a des entreprises et des donnes technologiques sensibles.
le vidage des poubelles des bureaux est une occupation intéressante pour collecter des informations… le travail hors heures d;ouverture et l’acces a tous les bureaux et ateliers permet de récupérer des donnes utilisables soit directement, soit de négocier les informations avec les concurrents des entreprises nettoyees….
bien joue