En Chine, avec une vingtaine d’avions d’affaires vendus, la filiale de Dassault « Dassault Falcon Jet » s’est imposée face à des concurrents présents depuis plus longtemps qu’elle… Une saga et une rencontre exclusive avec l’un des grands capitaines d’industrie français : Serge Dassault.

A l’origine de cette aventure industrielle familiale historique, un homme : Marcel Bloch. En 1928 il fonde la Société des Avions Marcel Bloch, entreprise qui sera natio- nalisée en 1937. Il lance alors quelques mois après cet « événement » la société anonyme des avions Marcel Bloch (SAAMB).
Refusant de collaborer durant la seconde guerre mondiale, il est arrêté et déporté avec sa femme, Madeleine, et leurs deux fils, Serge et Claude. C’est en 1949 qu’il changera son nom en Dassault, dé- rivé de « Char d’assault », nom de résistant de son frère, le Général Paul Blochson. L’aventure industrielle commence alors dans cette France des « Trente Glorieuse » avec les premiers avions à réaction français puis le développement d’une division de l’en- treprise dédiée à l’électronique et aux radars.
Viendront ensuite les Mystères, le Mercure (qui fit les beaux jours de la compagnie des lignes intérieures françaises Air Inter), les Mirages, le Rafale et le Falcon successeur du fameux Mystère.
Le groupe acquiert une image de performance et de technologie dans les domaines de l’aviation civile et militaire.
Serge, fils de Marcel Dassault, a su reprendre l’entreprise familiale et lui redonner l’élan nécessaire à son développement internatio- nal. Le groupe Dassault est présent aujourd’hui dans l’aviation mais aussi la presse, la technologie informatique (avec notamment Catia), la robotique, les véhicules électriques ou encore le vin.
Un esprit de famille
“Notre ambition première est d’être les meilleurs, et de satisfaire nos clients”, tient à préciser Serge Dassault qui souhaite maintenir, au sein de la société ce qu’il nomme “l’esprit Dassault” : “engagement durable et quotidien auprès de nos clients et de nos collaborateurs”.
C’est cet esprit de famille qui fait la spécificité du groupe et aussi son unité. “Cet engagement nous permet d’aborder l’avenir avec détermination et confiance”, souligne le capitaine d’industrie.
À propos de la Chine, Serge Dassault manifeste un véritable intérêt pour « l’Empire du Milieu » qu’il a vu évoluer au fil des années.
“Il y a des investisseurs pour un produit comme le nôtre. La Chine pour nous est l’un des pays les plus importants pour le développement des avions d’affaires.
Ce pays est la deuxième puissance économique mondiale, il ne faut pas l’oublier ! À terme c’est un marché qui peut représenter de 10 à 20% de nos ventes”, indique Serge Dassault.
Le marché de l’aviation civile en Chine connaît un véritable boom. Les infrastructures se sont nettement améliorées ces dernières années et depuis peu la réglementation s’est assouplie. Des centres de services ont été ouverts par le groupe et d’autres ouvertures sont prévues.
“On est parti un peu en retard par rapport à nos concurrents car nous étions focalisés sur le marché américain qui marchait très bien”, précise-t-il.
Développement d’activités autres que l’aviation
« Nous avons reçu un grand nombre de délégations chinoises sur le Salon du Bourget. Des négociations sont en cours, ce qui est fondamental pour nous, surtout avec l’absence de marchés aux Etats-Unis. Les Chinois ont compris l’importance du travail et s’intéressent à tout. Ils ont la chance de pouvoir investir des sommes d’argent importantes et c’est la raison majeure des présences occidentales ici”, poursuit l’industriel français.
Avec une forte augmentation de l’implantation de ses bureaux en Chine, le Groupe Dassault développe des activités, autres que liées à l’aviation. Un accord avait d’ailleurs été signé lors de la visite présidentielle française de 2006 entre le groupe Dassault et Dan KONG, le président de China Citic Group concernant le pro- jet de véhicule électrique et de véhicule de type hybride.
“Nous n’avons pas encore véritablement conclu sur ce marché mais notre technologie en la matière intéresse beaucoup les chinois”, explique Serge Dassault.
La question du savoir-faire reste au centre des discussions. L’intérêt des Chinois pour les technologies des grands groupes occidentaux étant de plus en plus fort. “Il faut rester vigilants pour ne pas être copié. Leur vision à long terme est avant tout d’apprendre à tout faire pour pouvoir ensuite reproduire et revendre au monde entier. C’est assez logique”, souligne l’homme d’affaire.
En début d’année, l’équipementier chinois AVIC, dont une des filiales fabrique déjà les ailes des A320, a demandé à Dassault Aviation d’établir une usine d’assemblage en Chine pour la construction des avions d’affaires Falcon.
« La Chine a compris que sans les riches, le pays ne serait composé que de pauvres ! »
Demande rejetée aussitôt par le groupe français (à la différence d’Airbus qui as- semble des A320 à Tianjin). “Cela n’est pas à l’ordre du jour et ne se justifie pas sur un plan industriel et économique. Les coûts logistiques pour faire transporter nos fuselages, nos mo- teurs et nos ailes seraient prohibitifs par rapport aux autres gains éventuels,” expliquait en juin dernier, lors du Salon du Bourget, Olivier Villa, directeur général adjoint en charge des avions civils pour Dassault Aviation, à nos confrères de l’Usine Nouvelle.
Pour Serge Dassault, la Chine est sur la bonne voie pour devenir la première économie mondiale.
« Les Chinois font ce que nous ne faisons plus ou moins ; ils investissent dans le monde entier, en Afrique, dans les pays de l’Est. Ils sont présents sur tous les marchés. Les milliardaires chinois n’ont pas peur d’investir et le font pour développer l’économie de leur pays. La Chine a compris que sans les riches, le pays ne serait composé que de pauvres ! C’est peut être un peu simpliste mais c’est une réalité ! »
L’avenir ? Les équipes vont se concentrer en Asie sur la Chine, l’Inde et la Malaysie. D’autres zones sont à l’étude, rien n’est mis de côté pour le Groupe.
« Je ne suis pas l’adage qui veut que si l’on pense que ça ne va pas marcher on n’y va pas. J’ai essayé des choses dites impossibles et j’ai réussi”, conclut le chef d’entreprise français.
Après le succès du Salon du Bourget en juin dernier et une présence remarquée au Jet Expo 2011 en Russie le 13 septembre dernier, le Groupe français se prépare activement pour le 64ème meeting de la National Business Aviation Association (NBAA) qui se déroulera du 10 au 12 octobre prochain à Las Vegas.
Lire le premier article du dossier de Trait d’Union, Alain Juppé: « Les relations bilatérales entre la France et la Chine sont excellentes »
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