L’arrestation, la semaine dernière, d’un équipage chinois par le Japon autour d’îles revendiquées par les deux pays a provoqué une vive réaction de Pékin, jugée démesurée dans l’archipel. Cette affaire, qui ravive un vieux conflit territorial, pourrait bien refroidir fortement les relations sino-japonaises.

C’est le dernier épisode d’une série de tensions territoriales survenues ces derniers temps en mer de Chine méridionale.
Après que les Etats-Unis aient irrité Pékin en tentant de s’imposer comme médiateur dans le différend qui oppose les pays de la région autour d’une centaine d’îlots de la région, minuscules mais très prisés pour les ressources que leurs eaux territoriales renferment, c’est au tour du Japon d’être opposé à Pékin.
L’incident déclencheur s’est produit mardi dernier, au large d’une série de cinq îles, appelées Diaoyu par la Chine, Diaoyutai par Taiwan et Senkaku par le Japon.
Situées entre Taiwan et Okinawa, au sud de l’archipel, ces îles et Taiwan avaient été cédées par un empereur mandchou au Japon en 1895. Après la seconde guerre mondiale, Taiwan avait été rendue à la Chine, mais pas les Diaoyu/Senkaku.
La semaine dernière, après qu’un bateau de patrouille japonais, le Yonakuni, ait ordonné au bateau de pêche chinois de cesser de pêcher dans ces eaux revendiquées par le Japon, le bateau chinois l’aurait heurté intentionellement.
Après avoir pris la fuite, il était entré en collision avec un autre bateau japonais, selon les gardes-côtes japonais, qui ont procédé à l’arrestation du capitaine et de son équipage pour cause d' »obstruction au devoir public ».
Vive réaction à Pékin
Pékin a immédiatement réagi en exigeant la libération de l’équipage, ce à quoi le Japon a répondu qu’il agirait en fonction du droit japonais.
Depuis, la tension diplomatique n’a cessé de monter. En une semaine, les autorités chinoises ont convoqué quatre fois l’ambassadeur du Japon à Pékin pour exiger la fin de la détention de l’équipage, qu’elles jugent illégale puisque l’incident s’est produit dans des eaux qu’elles revendiquent.
A chaque fois, le Japon a opposé la même réponse, affirmant sa légitimité à appliquer la loi japonaise.
La tension est encore montée d’un cran, vendredi, lorsque la justice a décidé, en dépit des protestations chinoises, de prolonger de dix jours la détention de l’équipage.
Les autorités judiciaires ont par ailleurs ouvert une enquête, soutenue par une reconstitution de la scène, afin d’en déterminer les circonstances précises.
Le Japon cherche également à savoir si les poissons trouvés à bord du bateau chinois ont été pêchés dans sa zone de pêche. Il proviennent vraisemblablement d’une région où les zones économiques exclusives des deux pays se chevauchent.
Les deux parties inflexibles sur leur position
Le ministère des Affaires étrangères chinois a immédiatement frappé du poing sur la table en déclarant via son porte parole que cette enquête était « ridicule, illégale et invalide », et que le Japon devait immédiatement mettre un terme aux actions envenimant la situation, et libérer inconditionnellement l’équipage et le bateau, selon le quotidien gouvernemental chinois Global Times.
« Si le Japon continue dans cette attitude imprudente, il goûtera à son propre fruit amer« , a ajouté le porte parole.
Vendredi, la Chine a exprimé son mécontentement en reportant la tenue d’une réunion prévue pour la mi-septembre, qui devait amener à la signature d’un traité bilatéral sur le développement conjoint de l’exploitation gazière en mer de Chine. Pékin a également affirmé que d’autres répercussions pourraient suivre.
Cette réaction de la Chine a largement été considérée comme exagérée par la presse japonaise, le grand quotidien japonais Yomiuri allant jusqu’à la qualifier d' »amère ». La presse officielle chinoise, quant à elle, s’est offusquée de l’impertinence japonaise.
« Si les tensions autour des îles Diaoyu augmente, cela affectera les relations économiques et commerciales entre les deux pays, ainsi que les voyages au Japon des touristes chinois« , a déclaré Liu Jiangyon, vice-président de l’institut des études internationales à l’université de Qinghua, au Global Times.
Dans un éditorial, le même journal, déplorant l’attitude japonaise, note que le Japon fait « régulièrement des provocations amenant à des protestations populaires, comme la modification de ses livres d’histoire ou les visites des leaders au temple Yasukuni où sont enterrés des criminels de guerre ».
La fin d’un « status quo »?
Dans les six premiers mois de l’année, la valeur commerciale échangée entre le Japon et la Chine s’est élevée à près de 1 billion de yuan (115,5 milliards d’euros), 34,5% de plus que l’année précédente, selon l’Organisation de Commerce Extérieur du Japon.
Pourtant, malgré les intérêts économiques en jeu, le problème ne semble pas prêt d’être réglé.
Le Japon n’a montré aucun signe de recul sur sa position initiale, et il est improbable que la Chine, qui considère les îles de la mer de Chine méridionale comme faisant partie de ses « intérêts vitaux » (au même titre que le Tibet ou le Xinjiang), renonce à ses revendications.
Pékin craint par dessus tout que cette affaire soit ensuite utilisée comme un précédent légal par le Japon pour une future justification de sa possession des « Senkaku ».
Mais l’affaire pourrait bien ne pas en rester là, car elle semble avoir marqué la fin d’un « status quo » en vigueur depuis des années, qui permettait aux deux pays d’évoluer relativement tranquillement en attendant de trouver une solution au différend.
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