A Shanghai, ville qui cherche à développer son image internationale, il est encore possible arrondir ses fins de mois en devenant modèle ou mannequin. A condition d’avoir les mensurations exigées, surtout pour les femmes. Il est de fait, plus facile pour les hommes occidentaux de trouver un travail dans ce domaine.
« Je croyais possible de devenir modèle à Shanghai, où l’on fait l’apologie de la peau blanche, des tailles girafes. »
Comme beaucoup de nouveaux venus, Aurélie Hiez, grande blonde aux yeux clairs, s’est lancée dans cette activité irrégulière, qui offre de bons revenus, pour continuer ses études d’art à Suzhou.
« Trois agences m’ont reçue sans book ni expérience. » Le verdict est tombé : « 57kg pour 1m78, c’est trop». Elle a pourtant obtenu un emploi. Aurélie a posé deux jours et demi sur des machines de construction, au salon des expositions. Elle a gagné 150 euros, « en ayant investi 300 euros de vêtements, coiffeur et esthéticienne, sans compter les frais de taxis ». Elle a vite renoncé.
Marc Baltzinger a eu plus de chance l’an passé. Ce diplômé de l’ISEG de Strasbourg, 25 ans, 1m90, blond aux yeux clairs, ne pensait pas à ce métier.
« Mais j’ai été repéré dans une boite de nuit puis à l’université, relais des clients, où j’étudiais le chinois.»
Il a enchaîné les castings. « Mon agent principal me faisait passer pour un professionnel. J’étais face à des bruns musclés portugais, italiens, brésiliens. Ma jeunesse par rapport à ces vrais professionnels de la trentaine et ma blondeur m’ont permis de remporter près de 20% des castings. »
Malgré ce petit succès, il vient d’y mettre un terme pour un poste dans sa spécialité.
La concurrence est devenue rude. Depuis l’explosion du marché au début des années 2000, les agences se sont multipliées, les mannequins et modèles étrangers seraient une soixantaine à Shanghai, contre une dizaine il y a quelques années.
Près de la moitié des marques locales de vêtements et de chaussures engageraient des étrangers, considérés comme des consommateurs de produits de qualité. Les prix ont chuté avec le développement du marché et les exigences accrues des clients chinois.
« S’ils ne trouvent pas les modèles souhaités ici, ils les font venir de l’étranger », souligne l’agence Model Inc.
Marc Baltzinger tablait tout de même sur 6000 RMB mensuels, avec des journées de premier rôle à 2000 RMB et de second rôle à 1000 RMB.
Reste à faire sa place. Brésiliennes et Européennes de l’Est, formées puis envoyées par leur maison mère avec un contrat en poche, « représentent 90% de nos mannequins et modèles », affirme l’agence Model Inc.
Les critères des femmes sont stricts (visage mignon, corps immature, 1m75 minimum, 55 kgs maximum), ceux des hommes, plus souples, leur permettent de débuter plus aisément en free lance.
« Il existe un réel besoin d’hommes de 18 à 29 ans, d’1m85, bruns et blonds, musclés » affirme Model Inc. Mais « avoir un book, un très bon agent, maîtriser l’anglais, se faire respecter en affaires sont essentiels », insiste Aurélie Hiez, qui a renoncé à cette activité en partie pour ces raisons. Même si les contrats signés sont rares, surtout pour les débutants, ils garantissent l’exploitation des photos.
Sans book ni garde-robe, étudiants ou employés peuvent aussi devenir figurants occidentaux, fonction très demandée. Payés 50 RMB l’heure ( 5 euros), ils constituent le public d’un stade ou d’une série TV.