Finis les glaçons ou le coca avec les grands crus : alors que le marché du vin se porte mieux que jamais en Chine, les consommateurs chinois savent désormais apprécier cette boisson « bien de chez nous ».

S’il est un marché porteur en Chine en ce moment, c’est bien celui du vin.
Les Chinois en consomment de plus en plus, suivant un véritable effet de mode, qui n’en finit pas de se propager depuis la percée du vin en Chine, il y a quelques années.
Le marché ne cesse de se développer, à tel point que beaucoup de Français travaillant dans le secteur comptent désormais largement sur la Chine pour soutenir leur activité.
C’est le cas des professionnels bordelais : en mars dernier, Le Comité Interprofessionnel du Vin de Bordeaux a annoncé que la Chine était devenue la première importatrice de vins de Bordeaux hors de l’Union Européenne.
L’AOC Côtes-de-bordeaux, par exemple, a multiplié par trois ses exportations vers la Chine depuis 2005.
« Aujourd’hui, la moitié des exportations de l’Aquitaine, c’est du vin vendu en Chine. La demande explose« , confirmait Alain Juppé à la Croix lors d’une visite diplomatique au début du mois, en sa qualité de maire de Bordeaux.
Un véritable « travail d’éducation »
Autre aspect de ce développement du marché : les consommateurs chinois, encore totalement ignorants de la culture du vin il y a peu de temps, commencent à l’apprécier de plus en plus.
« Il y a quelques années, on voyait couramment des Chinois boire du vin en le diluant avec du Sprite, du Coca ou des glaçons« , se souvient Frédéric Choux, président de DCT Wines, une société basée à Dalian. « Mais en peu de temps », assure-t-il, « on a vu une progression fulgurante dans le processus de consommation« .
Depuis le lancement de DCT Wines, il a tout de suite fait le pari de la qualité. Des vins mis en bouteille en France, et transportés dans des containers soigneusement réfrigérés.
Avec, sur place, un véritable « travail d’éducation » des consommateurs au goût, mais aussi à la culture du vin, à travers des dégustations et des présentations du processus de production traditionnel.
« Il y a six ans, nos premiers clients achetaient systématiquement en fonction du prix : soit la bouteille la plus chère, soit la moins chère. Maintenant, ils ont compris que cela ne fait pas tout : ils reviennent, me posent des questions et goûtent avant d’acheter« .
Mieux : les clients de Mr Choux sont désormais capables de dire si ils aiment ou pas un vin, et « même si il ne savent pas forcément expliquer pourquoi, c’est déjà une progression nette« , estime-t-il.
Un livre pour marier la cuisine chinoise aux vins français
A travers tout le pays, et plus seulement dans les seules Pékin et Shanghai, les Chinois se mettent à apprécier le vin. Des clubs d’amateurs se multiplient, et une école de dégustation a même vu le jour à Shanghai en 2009.
Fondée par l’un des plus grands importateurs de vins chinois, l’école World Wine Education s’étend sur 500 mètres carrés dans un vieux quartier de la ville.
« Beaucoup d’actions pédagogiques se mettent en place pour éduquer les consommateurs« , constate Claude Lada, éditeur bordelais spécialisé dans le vin.
Directeur de la revue professionnelle Bordeaux News, qui parait en Chine depuis 5 ans, M.Lada est également l’auteur d’un guide en chinois des vins de Bordeaux, paru en 2009.
Plus récemment, il a écrit un livre intitulé Cuisine chinoise et grands vins de France, fruit d’une collaboration avec un célèbre gastronome chinois, dans lequel il associe des plats typiques avec des vins français.
« Avec les plats du Sichuan, qui sont très épicés, les vins d’Alsace sont parfait pour éteindre le feu, conseille-t-il. Alors qu’avec les fruits de mer du Shandong, un blanc sec fera parfaitement l’affaire. Et avec un canard laqué de Pékin, salé mais aussi sucré et caramélisé, je recommande un Sauterne« .
Lui aussi a constaté une évolution dans les pratiques de consommation des Chinois.
« Certes, le vin en Chine reste un élément socialement valorisant. Il y a l’image du vieux continent, quelque chose d’un peu magique. On offre des bouteilles très chères pour faire bien, y compris pour des affaires de corruption. Mais depuis quelques années, par mimétisme, ils ont aussi appris comment l’apprécier » explique-t-il. Les consommateurs ont compris qu’entre l’entrée de gamme et un Lafite Rothschild, il y a des choses très intéressantes« .
Le vins chinois à la traîne
L’engouement pour une production française de qualité est donc bien réel. Cependant, il reste encore largement minoritaire face à la production locale.
Les vins français détiennent environ 5% du marché, et la Chine, désormais 6e productrice mondiale, consomme à 90% son propre vin.
Mais si la production chinoise est massive, la question de la qualité demeure. « La production évolue à vitesse grand V en qualitatif, concède pourtant M. Choux. Si l’on cherche et qu’on y met le prix, on peut trouver des bons, voire des très bons vins ».
« Je n’en ai trouvé qu’un bon, c’est le Gracewineyard, commente pour sa part M.Lada. Pour le reste, honnêtement, c’est du jus de raisin fermenté. Tout est industriel, et même quand il y a le savoir-faire, il manque la notion de terroir. Par exemple, un bon vin, ça pousse sur des vieilles vignes, ce qu’ils n’ont pas ici« .
C’est sans doute là, la chance de la production française. Pour M.Lada « le vin est presque un objet de culte, ou en tout cas, ce n’est pas un produit ordinaire. Il ne peuvent pas le plagier« .
Attention cependant : des contrefaçons de vins français ont déjà été repérées en Chine. Des fausses bouteilles de Mouton Cadet ont circulé longtemps sur le marché, avant que le producteur ne retrouve le contrefacteur.

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Bonjour,
en effet, et malgré le dynamisme croissant du marché chinois pour le vin français, le vin consommé sur place est encore à 90% du vin chinois.La marge de manœuvre est d’autant plus importante que les Chinois consomment en moyenne, par an et par personne, seulement 1.15 litres de vin.
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