Le président chinois a appelé hier à un « développement politique avec des caractéristiques chinoises » à l’occasion du trentième anniversaire de la zone économique spéciale de Shenzhen. Un discours à contre-pied de celui qu’avait récemment tenu au même endroit le premier ministre. Wen Jiabao avait provoqué la surprise en appelant à une « réforme politique » du pays.

L’anniversaire des trente ans de l’établissement de la ville de Shenzhen, dans le sud du pays, comme « zone économique spéciale », a été célébré hier en grande pompe par le président chinois.
Trente ans après que les réformes d’ouverture aient été introduites à Shenzhen par Deng Xiaoping, transformant en l’espace de trois décennies ce petit village en une ville moderne de 14 millions d’habitants, Hu Jintao a salué ce « miracle dans l’histoire mondiale de l’industrialisation, de l’urbanisation et de la modernisation, qui a contribué de façon significative à l’ouverture de la Chine et aux réformes« .
Mais si le président, lors d’une cérémonie de grande ampleur dans la tradition du parti, a parlé longuement des réformes économiques, il a quelque peu déçu les attentes de certains observateurs, qui espéraient le voir parler de réformes politiques, après une récente sortie de Wen Jiabao, au même endroit.
« Les droits démocratiques du peuple doivent être garantis »
Lors de sa visite de la ville, les 20 et 21 août dernier, le premier ministre avait quelque peu surpris par la teneur de ses propos.
« Les droits démocratiques et légitimes du peuple doivent être garantis, avait lâché Wen selon Reuters. Les gens devraient être mobilisés et organisés de façon à s’occuper, en accord avec la loi, des affaires d’Etat, économiques, sociales et culturelles«
Expliquant que sans réforme politique, « les fruits de la croissance économique seront perdu et le but de la modernisation ne se matérialisera pas« , le premier ministre a également appelé à ce que soient crées des conditions permettant au peuple de critiquer et de surveiller le gouvernement, de façon à « résoudre le problème de la concentration excessive et illimitée du pouvoir« .
Ces déclarations, si elles ne sont pas les premières du genre dans la bouche de dirigeants chinois (avec peu d’effets concrets par la suite), ont tout de même été considérées comme exceptionnellement appuyées, et provoqué de vives réactions.
Le Southern Daily a qualifié cet événement de « capital » et a appelé « une nouvelle génération de réformistes à se lever« , tandis que le Yangzi Daily en a profité pour rappeler que la stabilité chinoise ne serait pas durable sans changement politique, une idée également relayée par le Global Times.
Les observateurs internationaux y sont eux aussi allés de leurs analyses, certains pensant que Wen, bien qu’impuissant à changer en l’état le système politique, avait ainsi, deux ans avant la fin de son mandat, posé des jalons sur lesquels pourraient s’appuyer de futurs leaders réformateurs.
Un « développement politique avec des caractéristiques chinoises »
Mais il reste difficile de déterminer à quel point le Premier ministre a parlé en son nom ou en celui d’une partie des dirigeants du parti, aspirant à une réforme politique du pays. La réforme politique est un sujet très sensible depuis les années 80, avec les événements de Tian an men et l’éviction des réformateurs Hu Yaobang et Zhao Ziyang.
Quoi qu’il en soit, Hu Jintao n’a pas suivi Wen Jiabao dans son discours d’hier. En guise d’évocation du système politique, le président a réaffirmé ses positions, dans des termes ambigus, mais qui ont calmé les espoirs des partisans de la réforme.
« Nous devons persister sur la route du développement développement politique avec des caractéristiques chinoises (…) et favoriser l’auto développement du système politique socialiste« , a déclaré M.Hu.
« Aussi longtemps que l’on parle de « caractéristique chinoises », il n’y aura rien de nouveau, à décodé Chang Ziming, analyste indépendant, interrogé par le quotidien de Hongkongais South China Morning Post. Cela veut dire que la Chine continuera de refuser de reconnaître les valeurs acceptées par la communauté internationale« , a-t-il ajouté.
MM. Wen et Hu semblent donc plus que jamais ne pas être sur la même ligne idéologique, même si le changement de la structure politique attendra encore sans doute longtemps.
« Beaucoup de leaders sont encore en train de répéter un promesse hors d’âge de « poursuivre la réforme pour que le pays aie un avenir radieux », concluait récemment un édito du magazine Caixin.
Les principes profonds exposés par le premier ministre à Shenzhen représentent un changement majeur d’attitude envers la réforme politique. Mais la clef, ce sont maintenant les actes. Nous ne pouvons pas attendre plus longtemps ».

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