Pékin et Taipei ont progressé dans leurs discussions sur la structure et le contenu d’un ambitieux accord-cadre de coopération économique qui pourrait entraîner leur rapprochement le plus étroit depuis la séparation des deux rivaux en 1949.

Toujours à pas savamment comptés, le rapprochement entre le continent et l’île poursuit lentement sa route. Dimanche 13 juin, négociateurs chinois et taïwanais ont entériné à Pékin la troisième étape d’un ambitieux accord-cadre de coopération économique.
Pièce centrale de la politique de conciliation engagée depuis deux ans par le président taïwanais Ma Ying-jeou, cet accord qui fait l’objet de longues et difficiles discussions depuis janvier consiste pour l’essentiel en une baisse mutuelle des taxes d’importations.
Les négociateurs ont fait part des deux côtés « d’avancées substantielles » à l’issue de ce troisième round, sans mentionner si l’objectif d’une signature en juin serait atteint.
D’après le rapport révélé par la partie taïwanaise, Taipei s’est engagé à abaisser les tarifs douaniers sur 200 produits chinois à destination de l’île. A l’inverse, 500 produits taïwanais se verront renvoyer l’ascenseur, ce qui représente 15% des exportations de l’île à destination du continent. Les secteurs de la pétrochimie, de la machinerie, de l’automobile et du textile seront les premiers à en bénéficier.
Vu comme une étape essentielle du rapprochement entre les deux rivaux historiques, cet accord fait pourtant l’objet de vives critiques dans l’île.
Pour l’opposition taiwainaise, ce texte, une fois signé, ne fera qu’ouvrir la voie à une invasion des produits à bas prix made in China. Des craintes qui semblent justifiées pour certains secteurs. « Il y aura à l’évidence des gagnants et des perdants. L’inégalité est frappante entre Taiwan et le marché chinois. Taiwan est très concurrentiel pour l’exportation de produits à haute valeur ajoutée mais les secteurs sensibles jusqu’ici très protégés comme l’agriculture risquent d’en pâtir », explique Xavier Richet, chercheur au Centre d’études français sur la Chine contemporaine, à Hong Kong.
En outre, l’opposition y voit un premier pas vers la stratégie de réunification voulue par Pékin. Lee Teng-Hui, ancien président taïwanais, devenu un partisan radical de l’indépendance de Taiwan, a parlé au sujet de ce texte d’un « accord-cadre de colonisation ultime qui entraînera la domination de Taiwan par la Chine ». Une grande manifestation est prévue à Taipei le 26 juin prochain pour protester contre cet accord.
Depuis son arrivée au pouvoir en mai 2008, l’actuel président taïwanais tente désespérément de défendre sa politique de rapprochement avec le continent. Pour M. Ma, cet accord est indispensable au maintien de la compétitivité économique de l’île alors que la Chine a signé un nouvel accord commercial avec les pays de l’Asean en début d’année.
Selon lui, il pourrait même ouvrir la voie à des accords de libre échange entre Taiwan et d’autres pays. Un argument difficile à faire entendre, la Chine continuant de menacer tout pays tiers qui s’aventurerait à la signature d’accords similaires avec Taiwan.
