Le vélo, c’est la liberté. Notamment la liberté de copier le système de location du groupe français d’aménagement urbain. Le plus grand constructeur de bicyclettes de Chine lance son propre Vélib’ dans les grandes villes et prétend que son système est « 100% chinois », malgré de troublantes ressemblances.

Sur la grande avenue de Chaoyangmen, à Pékin, d’étranges bicyclettes oranges ont fait leur apparition. A la sortie de la station de métro Dongsi, les badauds observent, curieux. Quelques vélos en location, rien de bien original, dans la ville aux « 9 millions de bicyclettes ». Un détail toutefois attire le regard : il n’y a pas de loueur. Juste un alignement de vélos de la marque Forever, la plus répandue en Chine, accrochés à leurs bases par un système rappelant étrangement celui que connaissent les Parisiens et les Lyonnais.
Depuis quelques temps, le système de location « Forever » fait son apparition dans les grandes villes chinoises. Même principe de cartes avec abonnement annuel, bornes d’accrochage au fonctionnement identique et au design similaire. Comme le Vélib’, la première demi-heure est gratuite, puis le prix monte jusqu’à 30 centimes d’euros. La caution est d’un peu plus de 20 euros, un montant équivalent au prix d’un vélo bas de gamme en Chine.
Le système de location de vélos aurait-il été copié sur celui de JCDecaux, le champion du mobilier urbain ?
Une technique 100% chinoise
« Je peux vous jurer que cette technique est 100% chinoise, répond Zhong Ming, responsable de projet de Forever Bicycle, d’ailleurs je n’ai jamais vu de Vélib’ en vrai, juste en photo ».
L’entreprise n’est pas peu fière d’avoir lancé ce système en Chine. « Nous sommes les meilleurs du pays. Avec nos bornes, le service est automatique et donc disponible 24h sur 24 » se félicite M. Zhong.
L’entreprise shanghaienne dit avoir commencé à réfléchir au projet en 2006. Elle dispose de plusieurs bornes dans sa ville d’origine, où elle a commencé à opérer à l’automne 2008, principalement dans le district de Minhang, avec en perspective l’Exposition universelle et son slogan, « meilleure ville, meilleure vie ».
Elle tente également l’expérience à Pékin, Shenzhen et Chengdu. Mais son objectif à moyen terme est de couvrir le Zhejiang et le Jiangsu, deux provinces fortement urbanisées proches de Shanghai.
Dans des métropoles en plein boom, où les transports publics se développent rapidement mais les distances à parcourir entre le logement et le métro restent longues et où la culture du vélo est bien ancrée, le Vélib’ a toute ses chances.
L’expérience fonctionne plutôt bien, fait remarquer le responsable de projet. Quelques problèmes toutefois, par exemple pour gérer la répartition des vélos entre les bornes. « Mais ce sont des problèmes inhérents à ce genre de services ».
Profitant de contrats dans d’autres domaines, JCDecaux ne fait pas de remous
Lorsque les Vélib’ ont été lancés en France, l’entreprise a bien eu quelques contacts avec JCDecaux, mais seulement sur les vélos, précise Zhong Ming, parce que son entreprise est le leader chinois de la petite reine.
Mais sur ce projet et son lancement dans les villes les plus importantes du pays, Forever Bicycle a fait sans l’inventeur du système. De son côté, JCDecaux précise bien n’avoir aucun projet de type Vélib’ en Chine. Son système de location est implanté dans plusieurs villes d’Europe et a été lancé au Japon. Mais rien ici.
Difficile pour le groupe français d’aménagement urbain d’ignorer la situation dans ces grandes métropoles. Sur son site internet, il met en avant son omniprésence dans le pays. Il assure ainsi l’intégralité de la publicité dans les métros de Pékin et de Shanghai, travaille également sur l’affichage sur les bus, les campus et les aéroports.
Pourtant, JCDecaux ne semble pas se préoccuper outre mesure de cet emprunt un peu irrégulier. ll ne souhaite probablement pas froisser des municipalités qui lui assurent de juteux contrats dans d’autres domaines.