Voici un musée introuvable dans les guides traditionnels: la ville de Pékin s’est dotée depuis 2001 d’un gigantesque bâtiment, entièrement dédié à l’éloge de sa police.

Une façade blanche armée de colonnes chapeautées à mi chemin entre une architecture grecque et mussolinienne, le musée de la police de Pékin se veut imposant et universel. Le dépliant à l’entrée donne le ton » le musée est construit dans un style occidental classique, symbole de paix et d’élégance ».
Quatre étages sont à la disposition du visiteur pour une rencontre avec l’histoire de la police de la capitale qui, sans la moindre surprise, débute en 1949.
Quelques passages extraits d’une histoire plus ancienne sont assemblés en désordre dans un coin reculé du deuxième étage. Mais c’est sur la promesse d’une véritable police au service du peuple, née sous l’ère Mao, que s’ouvrent les premières salles.
Tan Zhengwen, premier directeur du bureau de la sécurité en est l’icône par excellence. Carte d’identité, permis de port d’armes, certificat de participation aux conférences du parti, laissez-passer du parti, les photographies du héro national dévoilent le seul visage que permettent les photographies officielles, celui du fondateur sans trait « de la mise en place d’une stabilité sans précédent ».
Batailles contre les Japonais et le Guomindang, les traîtres à la patrie sont punaisés à ses côtés affichant les stigmates de la honte et de la repentance.
Le mur arbore des autocritiques sommaires, écrites à la main dans un dessin appliqué, comme celle de Tang Hongwen du 12 octobre 49 : » En 1937, j’ai participé au Guomindang et à son organisation en tant qu’agent spécial… j’ai tué et fait des actes ignobles… j’ai maintenant décidé de changer totalement… s’il m’arrivait de violer cette déclaration, je souhaite être puni sévèrement ».
Les ennemis sont listés dans de gros cahiers bruns parfaitement conservés, exposés au public qui peut sans effort y lire les noms.
L’histoire se poursuit sur les portraits et noms des chefs qui ont compté. Aucun nom n’est affiché pour les dix années de la révolution culturelle décrite comme « une période de sang et de frayeur pour la population ».
Les chiffres des policiers exécutés à cette date doivent être enterrés sous le mémorial du troisième étage qui rend hommage à tous ceux qui sont morts dans l’exercice de leur travail.
A l’étage supérieur, un détour furtif par les empereurs Yao et Sun, il y a 4500 ans, pour se faire peur. Sabre pour couper les têtes, ou instrument de démembrement, ce court passage est un véritable délice dans l’usage de la torture des dynasties où avec un petit couteau, on découpait des morceaux des peaux des condamnés jusqu’à la cicatrisation bénie qui annonçait le moment propice où l’on pouvait recommencer.
Le reste du musée est consacré à la période plus moderne des années 80 à nos jours. Pour l’essentiel ce sont les méthodes dites scientifiques et révolutionnaires d’investigations de la police qui sont mises en avant.
Tout y est: détecteurs de mensonge, pinceaux et poudres de relevés des empreintes, appareils de surveillance, jusqu’aux crânes fêlés des victimes qui n’ont rien d’un moulage en plâtre.
Des vidéos chocs d’arrestations aux photographies des détenus, le musée de la police n’a pas hésité à exposer les condamnés avec leur nom et l’histoire de leur dégénérescence. « Sa vie de criminel est terminée » signale une pancarte adossée à l’assassin dont la mise à mort est imminente.
Une prison modèle est sous vitrine exposant une salle où une dizaine de lits sont juxtaposés avec une vue imprenable sur les sanitaires.
Pédagogie et interactivité sont de la partie. La population se doit de collaborer et les visiteurs sont invités à exercer leurs talents de citoyens fiables à partir d’un logiciel de constitution de portraits robot.
Les fonctions de la police s’élargissent au fur à mesure des étages. A l’ultime niveau, les panneaux autoroutiers côtoient les policiers en cire chevauchant de vraies motos, les pompiers et les sauveteurs.
Mais le musée ne saurait finir sans un clin d’œil à l’enjeu majeur de la Chine d’aujourd’hui, les Jeux olympiques. Les coupes et les récompenses débordent des vitrines de l’étage supérieur: les policiers sont immanquablement des sportifs dont le devoir est d’enseigner à la population les vertus du sport.
No.36 Dongjiaominxiang, Dongcheng District
Du mardi au dimanche de 9h à 16h
Tel: 8610-85222223; 8610-85222282