Xi Jinping appelle les officiels à vider leurs discours des formules vides de sens et, à la place, à trouver des solutions pratiques aux problèmes des citoyens. Le signe que les dirigeants chinois sont conscients du risque qu’il y a à se couper des masses.

Un discours d’officiel chinois est souvent une expérience particulièrement soporifique. Les références à la nécessaire stabilité, aux gloires de la Révolution, au succès des réformes ou encore à l’harmonie, concept clé de la politique du président Hu Jintao, se suivent et se répètent. Mais le vice-président chinois veut mettre un terme à cette tradition et appelle les officiels à faire bref et à cesser d’utiliser des « mots vides de sens ».
Lors d’une allocution donnée face à plus de 900 responsables politiques et étudiants à l’école du Parti, mercredi 12 mai, à l’occasion de la rentrée semestrielle, il a appelé à éradiquer les « formules vides de sens » ainsi que le « jargon politique » des discours, selon l’agence Chine Nouvelle. Xi Jinping incite l’élite politique chinoise à aller à l’essentiel et à user d’un langage plus familier auprès des masses populaires. Il n’en a pas moins eu recours à quelques formules rhétoriques dont le Parti a le secret, en critiquant par exemple les discours et documents « malsains », bien incapables selon lui de résoudre concrètement les problèmes.
Expliquant comment communiquer avec simplicité et concision, le vice-président a appelé l’élite politique chinoise de demain à « étudier avec diligence les théories fondamentales du Parti, acquérir constamment de nouvelles connaissances et apprendre de la littérature chinoise ancienne ».
L’expérience du franc parler a déjà été tentée au niveau local. L’an dernier, les dirigeants de la ville de Suining, dans la province du Jiangsu, avaient pris l’initiative de s’interdire les formules creuses et les discours fleuves.
L’appel de Xi Jinping, qui sauf accident de parcours pourrait succéder au président Hu en 2012, n’est pas qu’anecdotique. Les leaders du Parti communiste chinois s’inquiètent des risques qu’il y aurait à se couper des masses populaires, dont les préoccupations quotidiennes sont déjà souvent distinctes des leurs.
En 2009, un officiel de la ville de Zhengzhou, dans le Henan, avait été limogé pour avoir osé demander à un journaliste de la radio d’état s’il comptait s’exprimer pour le Parti ou pour le peuple, une distinction semble-t-il intolérable. Son insolence lui avait néanmoins valu la gloire auprès des internautes.
De même que l’ancien président Jiang Zemin avait compris la nécessité pour le PCC d’intégrer les nouveaux entrepreneurs afin de leur ôter la tentation de défendre leurs intérêts par leurs propres moyens, le Parti de 2010 – qui compterait près de 76 millions d’adhérents – considère que le risque de se couper des gens ordinaires est une menace au maintien de son monopole politique.
Dans un article publié il y a un mois dans le Quotidien du Peuple, le porte-voix du Parti, le Premier ministre Wen Jiabo a rendu un hommage personnel remarqué à un ancien leader victime d’une purge. Il y reprenait les termes « masses », « base » et « peuple » à de multiples reprises et écrivait : « Le plus grand danger pour ceux qui exercent le pouvoir est d’être coupé de la réalité ».
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