Li Li, l’étudiante chinoise surprise en train d’espionner chez Valeo, va passer en jugement. Son cas pose une question qui agite les services secrets partout dans le monde : les étudiants chinois sont-ils tous des espions en puissance ?

Mata-Hari ou simple stagiaire maladroite? Le tribunal correctionnel de Versailles doit examiner mardi le cas de l’étudiante chinoise Li Li, soupçonnée d’espionnage industriel chez l’équipementier Valeo à La Verrière (Yvelines) où elle effectuait un stage de février à avril 2005.
Cette étudiante aujourd’hui âgée de 24 ans, fraîchement diplômée de l’université de technologie de Compiègne (UTC), a-t-elle commis une simple faute professionnelle en sortant des fichiers informatiques de Valeo ou s’est-elle comportée réellement en espionne éprouvée ?
L’affaire éclate le 26 avril 2005, lorsque Valéo dépose plainte pour vol de données informatiques après avoir constaté la disparition d’informations de l’ordinateur mis à la disposition de l’étudiante et le téléchargement de données confidentielles présentes sur le réseau interne. Mise en examen peu après pour « abus de confiance » et « accès frauduleux à un système informatique », Li li est écrouée. Elle ressort en juin 2005, après 53 jours d’incarcération.
A l’époque, la polémique enfle sur fond de psychose commerciale sur les importations de textile chinois alors même que le ministre chinois du Commerce est en visite officielle en France. Présentée par une source proche du dossier comme une étudiante « brillante », polyglotte, « d’une exceptionnelle compétence » et bardée de diplômes, Li Li semble être la parfaite réincarnation de Mata-Hari, version made in China. Les premiers éléments des perquisitions, selon cette même source, indiquent que six ordinateurs d' »une puissance énorme » contenant des données « confidentielles » ont été saisis chez elle.
L’affaire fait des remous. Le pdg de Valeo, Thierry Morin, tente en personne de calmer le jeu, affirmant « n’avoir pas connaissance » que les données concernées soient des informations à « haut risque » et récusant « le terme d’espionnage industriel ». Aujourd’hui, Valeo maintient cette version mais réclame 150.000 euros de dommages et intérêts pour atteinte à son image de marque. »A l’origine, c’était une affaire banale d’appropriation de données confidentielles, mais nous n’avons jamais parlé d’espionnage », a expliqué à un membre du cabinet d’avocats Soulez-Larivière . « C’est une faute professionnelle que nous avons dénoncée au parquet, qui a estimé à son tour légitime de poursuivre ». Li li, elle, a toujours nié tout piratage, expliquant que l’ordinateur de la société étant saturé, elle l’avait vidé et transféré les données sur son disque dur personnel pour les sauvegarder. Elle affirme n’avoir pas prêté attention en signant la charte de confidentialité et ignoré qu’il était interdit d’utiliser un disque externe, niant avoir transmis ces données à quiconque.
De fait, l’instruction après deux ans d’enquête et plusieurs commissions rogatoires internationales, n’a fait apparaître aucun transfert à l’étranger, selon son conseil Me Raphaël Pacouret. »Li li est une stagiaire maladroite qui s’est rendue coupable de légèreté », a-t-il expliqué, précisant qu’il plaiderait la relaxe. « Il s’agit d’une faute valant une sanction professionnelle mais en aucun cas un traitement au pénal ».
De son côté, le parquet a estimé que « ce n’était pas l’affaire d’espionnage du siècle mais que l’infraction était bien caractérisée ». Mardi, Li li comparaîtra libre. Son contrôle judiciaire lui interdisant de travailler dans toute entreprise française, ne l’a pas empêché de continuer ses études à l’UTC et d’empocher un diplôme d’ingénieur. Elle travaille actuellement sur une thèse de doctorat.