Le cinéma européen est à l’honneur en Chine cet automne. Du 1er novembre au 2 décembre, Pékin, Chengdu et Xi’an vont accueillir le 3e festival du film de l’Union européenne. Longs et courts métrages sont au programme, passé au crible de la censure.

En Chine, le cinéma est populaire, les foules se pressent dans les salles. Mais le cinéma européen souffre d’un déficit de notoriété.
Lors de la conférence de presse organisée cette semaine pour promouvoir le 3e festival du film de l’Union européenne (EUFF), l’ambassadeur Serge Abou, chef de la Délégation de l’Union européenne en Chine, n’a pas caché ses intentions. Il souhaite faire de cet événement un tremplin pour la diffusion du cinéma européen dans le pays.
Entre 15 et 20 films européens sortent chaque année dans l’Empire du Milieu. La France figure en très bonne position, avec 5 films à l’affiche en 2010, soit un de plus que l’an dernier, selon les chiffres d’Unifrance.
Ce festival a pour but de redorer le blason de l’Europe dans les salles obscures chinoises. Ce n’est sans doute pas un hasard si ce projet a été lancé sous présidence française de l’UE, en 2008. La France a en effet toujours été sensible aux choses de l’esprit, comme en témoigne la première Exposition universelle de Paris en 1855, où la France avait introduit les Beaux-Arts aux côtés de l’industrie et du commerce.
« La première édition du festival est née sous l’impulsion commune de l’Ambassade de France en Chine et de la Délégation de l’Union européenne en Chine, en liaison avec l’ensemble des Ambassades européennes« , précise toutefois par courriel Olivier Delpoux, attaché audiovisuel à l’ambassade de France à Pékin.
Les films sont proposés par chacune des vingt-sept ambassades de l’UE en Chine, le plus souvent en collaboration avec la société organisatrice du festival, Art Genesis. « Nous opérons une présélection pour les pays qui, pour diverses raisons, sont moins impliqués dans cet événement« , explique sa directrice, Christine Pernin.
L’étape inévitable de la censure
La sélection terminée, les films projetés dans les cinémas commerciaux doivent passer l’épreuve du SARFT, le Bureau chinois de la radio, de la télévision et du cinéma. Autrement dit, le bureau de la censure. Les pays européens ont dû respecter un cahier des charges strict.
Pas de sexe, pas de violence, pas de politique : tel est le triptyque imposé par le SARFT. En Chine, les films doivent pouvoir être vus par toute la famille pour passer dans les salles. Les films choisis pour le festival sont donc le plus souvent consensuels et, partant, le critère de la qualité n’est sans doute pas le plus important.
La censure ne concerne toutefois que les films diffusés dans les cinémas – 12 sur un total de 26 projetés pendant le festival. Les 14 autres, dont deux courts métrages, seront visibles dans cinq centres culturels différents, à Pékin uniquement. Ce sont certainement les films les plus intéressants du festival.
Le film français retenu est « L’Autre Dumas », de Safy Nebbou. Il répond aux deux critères imposés par les organisateurs de la manifestation : un film récent et populaire. Pourtant, le film n’avait pas rencontré le succès escompté à sa sortie en France, en février 2010.
Mais pour Olivier Delpoux, c’est « un film de divertissement avec un contenu culturel, des acteurs célèbres, Gérard Depardieu, et Benoit Poelvoorde, connu du public chinois pour « Les deux mondes » sorti en Chine en 2009. Il nous a aussi semblé intéressant de présenter un film dont le personnage principal est un écrivain universellement connu, notamment en Chine« .
Le film polonais ne passe pas
D’autres pays, qui auraient aimé voir leur film projeté dans un des quatre cinémas partenaires du festival, n’ont pas passé le cap de la censure. C’est le cas du film polonais « The Reverse, A Communist Love Story », qui a rencontré un très grand succès populaire à sa sortie. Il sera donc visible uniquement dans les centres culturels. Selon le SARFT, contacté par téléphone, il n’y a pas eu censure, mais simplement un problème technique. Le film n’a pu être retenu en raison de la mauvaise qualité de la copie donnée par les Polonais.
D’après Renata Szostek, chargée du cinéma à l’ambassade de Pologne à Pékin, si le film n’a pas été accepté, c’est sans doute parce qu’il se passe en partie dans le Varsovie des années 1950, une période mouvementée de l’histoire du pays, alors sous régime communiste… Un passé communiste tourné en dérision par le jeune réalisateur Borys Lankosz, qui a peint dans son film une société polonaise dans laquelle le crime reste impuni. Pour la censure chinoise, on l’imagine, la coupe était pleine.
Depuis la première édition, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts. En 2008, 15 films ont été présentés, à Pékin uniquement, pour un total de 4065 spectateurs. Cette année, 26 films sont programmés, à Pékin, mais aussi à Chengdu, comme en 2009, et à Xi’an pour la première fois. Les organisateurs du festival espèrent dépasser le nombre de spectateurs de la deuxième édition – 14000. Une ambition somme toute raisonnable.
Le 3e festival du film de l’Union européenne aura lieu du 1er novembre au 2 décembre à Pékin, Chengdu, et Xi’an.
Les séances en salles seront au prix de 20 yuans. Elles seront gratuites dans les centres culturels.
Retrouvez la programmation du festival sur le site de la Délégation de l’Union Européenne en Chine
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