Guo Yan donne tous les mercredis soirs des cours de tango à Pékin. Elle revient sur sa passion et son envie de la faire passer à ses compatriotes.

Il n’est pas rare à Pékin, de voir en fin d’après-midi et sur des lieux publics, des danseurs lambda se rassembler spontanément et faire quelques pas de danse de salon en plein air. Les Chinois aiment la musique, ils aiment chanter, et la danse en couple est aussi un loisir qu’ils apprécient.
Qu’en est-il du tango ? Danse argentine qui implique un contact relativement intime entre les deux partenaires, et un réel partage des émotions qu’il suscite, le tango tel qu’il est dansé par les danseurs argentins, n’est pas encore bien compris par les chinois de la Chine continentale.
« Les chinois sont très pudiques avec les sentiments« , explique Guo Yan, professeur de tango et de salsa vivant à Londres. « Il y a, entre les latins et les chinois, une grande différence culturelle. Les latins sont passionnés, ouverts, et sont très expressifs. A l’opposé, les Chinois ne sont démonstratifs qu’avec leurs proches, les amis et la famille. Jamais avec des personnes extérieures, même s’ils éprouvent des émotions comme tout le monde ! »
Guo Yan est chinoise, mère de trois filles, et passionnée de salsa qu’elle enseigne depuis plus de dix ans, et plus récemment de tango, qu’elle a découvert à Buenos Aires grâce à sa seconde fille Solange. Cette dernière a créé en janvier 2006 l’association Tangoren, qui permet aux Pékinois de se retrouver tous les mercredis soirs dans un bar de la ville, pour apprendre le tango, et partager le plaisir de la « milonga », une des nombreuses catégories de tango. Les cours sont ouverts à tous, il y a d’ailleurs beaucoup d’occidentaux : Français, Canadiens, Allemands, Australiens…
« Malheureusement nous avons très peu d’élèves chinois dans nos cours« , poursuit Guo Yan qui a rejoint pour trois mois l’association Tangoren. « Je reviens tout juste de Hong Kong où tous mes élèves étaient chinois. Alors si les Hongkongais peuvent danser le tango, pourquoi pas les Chinois continentaux ? » D’après elle, les Chinois manquent cruellement d’informations sur cette danse, et ont beaucoup d’à priori. « Quand on leur dit tango, ils pensent tout de suite aux années 30, ou aux compétitions de danse de salon« , raconte-elle en mimant les pivotements de tête des danseurs en costumes.
Mais cette méconnaissance du tango n’explique pas tout. En dehors de la question de la relative intimité corporelle qui lie les partenaires le temps d’une danse, la question de l’argent est aussi à prendre en compte. « Apprendre le tango demande un certain investissement » explique Guo Yan. « Or, d’une part, la plupart des Chinois n’ont pas les moyens de se payer des cours de tango, d’autre part ceux qui le pourraient estiment qu’ils n’ont pas à payer pour apprendre à danser, car ils considèrent qu’ils sont déjà de bons danseurs. C’est le cas de beaucoup de Chinois. Je ne sais pas comment on pourrait changer cette mentalité. »
« Je remercie beaucoup ma fille de m’avoir fait découvrir le tango, et je la félicite d’avoir créé Tangoren, où les cours sont gratuits pour tout le monde » conclue-t-elle. « Mais je ne sais pas si la gratuité est une très bonne chose en matière de tango, car c’est une danse qui exige du sérieux et beaucoup d’assiduité. Quand les cours sont gratuits, les gens se sentent moins impliqués et responsables dans leur apprentissage. »
Guo Yan, insatiable sur sa passion du tango, est la première femme chinoise à avoir donné des cours de salsa à Pékin. Les habitants de la capitale peuvent la retrouver tous les mercredis soirs lors des cours de Tangoren.
Informations sur les horaires, adresse des cours et calendrier des événements sur le site :
http://groups.yahoo.com/group/TangoRen/