Les États Unis veulent s’imposer comme médiateur dans le différent qui oppose plusieurs pays d’Asie du Sud Est en mer de Chine méridionale. Défi à peine masqué à la puissance chinoise dans la région, cela pourrait bien y renforcer les tensions.

En visite à Hanoï vendredi dernier, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton a mis les pieds dans le plat. Tout en affirmant que les Etats Unis voulaient « rester neutre » dans le conflit qui oppose plusieurs pays autour de quelques îles stratégiques en mer de Chine méridionale, Mme Clinton a clairement annoncé l’entrée des Etats Unis dans le débat.
Selon Mme Clinton, les Etats Unis ont un « intérêt national » à préserver la liberté de naviguer dans la région et sont déterminés à faciliter des « négociations multilatérales » entre les différents pays.
Jusqu’ici, Japon, Corée, Vietnam et Chine se disputaient entre eux la propriété de près de 200 îles minuscules mais très convoitées pour leur gaz naturel, leur pétrole et les eaux territoriales qui les entourent.
Considérant la mer de Chine méridionale comme un « intérêt de base » de sa souveraineté nationale, au même titre que le Tibet et le Xinjiang, la Chine n’a pas du tout apprécié l’intervention de Mme Clinton. Les diplomates avaient pourtant prévenu les Etats Unis en mars dernier, qu’une intervention américaine sur ce point sensible n’était pas la bienvenue.
« Cela rendra juste le problème plus compliqué »
Si l’annonce a pris la forme d’une proposition d’aide dans la bouche de la secrétaire d’Etat, il s’agissait bien d’un signe que la Chine ne resterait pas longtemps la seule superpuissance présente sur le dossier.
La réaction chinoise ne s’est pas faite attendre.
« Quelles seront les conséquences si ce problème devient international, ou multilatéral? », s’est interrogé Yang Jieshi, le ministre des affaires étrangères, sur son site Internet. Cela rendra juste le problème plus compliqué« .
Dans les médias gouvernementaux, les éditorialistes n’y sont pas non plus allés de main morte.
« Les chercheurs, officiels et médias américains exagèrent les « tensions » en mer de Chine méridionale, alors que la plupart des pays de la région sont convaincus que la situation est pacifique« , écrit un journaliste de l’agence Xinhua.
« L’Histoire a souvent prouvé que l’intervention d’une superpuissance dans des zones contestées provoquait le plus souvent des complications et des tragédies, ajoute-t-il. (…) Les superpuissances utilisent la technique de « diviser pour mieux régner ». Ils attisent les tensions, les disputes et les conflits pour pouvoir se poser comme médiateur dans le but de maximiser leurs propres intérêts« .
Question d’influence
Ces événements se produisent dans un contexte par ailleurs relativement tendu. Dimanche 25 juillet, les Etats Unis se sont livrés à des exercices militaires conjoints avec la Corée du Sud au large de la péninsule, avec quelque 200 avions, 20 bateaux et le plus gros porte-avion du pays, le George Washingtown.
Certes, ces exercices se voulaient officiellement un message adressé à la Corée du Nord suite au torpillage d’une corvette qui avait entraîné la mort de 46 marins Sud-Coréens en mars.
Mais ces manoeuvres étaient également l’occasion d’affirmer la présence de l’armée américaine face à l’imposante puissance navale chinoise. La tenue d’une partie de ces exercices en mer Jaune, considérée par Pékin comme sa propre zone d’opération militaire, n’était pas faite pour plaire à la Chine.
Pour Xi Linping, expert sur l’Asie du Sud-est à l’Académie Chinoise des Sciences Sociales, les Etats Unis, longtemps distraits par les conflits en Irak et en Afghanistan, cherchent ainsi à renforcer leur influence dans la région.
« Les Etats Unis sentent qu’il est temps de jouer la carte politique et militaire puisqu’il est très difficile pour eux de se mesurer à la Chine dans la sphère économique, déclaré M.Xi à l’International Herald Tribune. Si Washington pouvait jouer un plus grand rôle dans la mer de Chine méridionale, « cela l’aiderait à continuer d’exercer son influence sur les pays d’Asie du Sud Est« , a-t-il estimé.
Mis à jour le 28 juillet à 14H14 (Pékin)
