La reprise en main de Shanghai, la capitale économique chinoise, intervient alors que depuis plusieurs années le gouvernement veut rééquilibrer le développement du pays en construisant d’autres pôles forts. Au Nord, Tianjin, est souvent appelée le « port de Pékin ».
Tianjin n’a pas l’attention exclusive des autorités centrales qui essaient aussi de valoriser l’ouest du pays, très en retard sur la côte orientale. Mais cette ville située à 120 kilomètres de Pékin, sur la mer de Bohai et ses champs pétrolifères, fait figure, dans bien des domaines, de favori, avec deux atouts de poids, son maire et son responsable du parti communiste.
Bien que natif du Jiangsu, province proche de Shanghai, Dai Xianglong est d’abord devenu vice-maire de Tianjin en 2002, l’année où Hu Jintao prenait la tête du Parti, puis maire en 2003. Ce membre du comité central du Parti communiste chinois (PCC), financier de formation, a surtout derrière lui une longue carrière dans la banque, y compris la Banque centrale dont il fut gouverneur jusqu’à son accession à la mairie de Tianjin.
Zhang Lichang, le secrétaire du Parti de Tianjin, est lui l’un des 24 membres du bureau politique du PCC. Industriel par la suite formé à la gestion économique, Zhang se démarque nettement de la faction de Shanghai, qu’a incarnée l’ancien président Jiang Zemin dont le protégé à la tête de la plus grande ville du pays, Chen Liangyu, vient de tomber pour corruption.
Sous l’impulsion de Dai et Zhang, l’Administration nationale des changes vient de décider une expérimentation hors du commun en Chine, réservée à la Nouvelle Zone de développement Tianjin Binhai (TBNA) : l’assouplissement du contrôle des échanges de devises dans le compte de capital. « Nous allons chercher le moyen de rendre le yuan convertible dans certaines zones et certaines limites« , a expliqué le maire en annonçant ce projet la semaine dernière. Des mesures de libéralisation qui pourraient attirer à Tianjin encore davantage de projets à capitaux étrangers, ou centres de recherche et développement.
Or Tianjin connaît déjà une belle croissance dans ce domaine. Selon les administrateurs de TBNA, cités par les médias chinois, au cours des sept premiers mois de l’année, la zone a vu des contrats signés pour un montant de 3,5 milliards de dollars impliquant des financements étrangers, soit 27% de plus sur un an. Il faut dire que la ville est devenue cause nationale, avec l’inscription au XIe plan (2006-2010) du développement de TBNA et de ses 2 270 kilomètres carrés sur la mer de Bohai, englobant le port et sa zone franche, ainsi qu’une zone économique spéciale, TEDA, lancée dès 1984, sans soutien de Pékin dont les efforts étaient alors accaparés par le Sud et l’axe Shanghai-Shenzhen-Canton.
Aujourd’hui, la municipalité, qui malgré ses 14 millions d’habitants a des allures de grosse bourgade provinciale, revendique 10 000 entreprises de 150 secteurs industriels, dont 70 du Top 500, ainsi que « plus de 2 000 institutions financières. Elle a réussi à attirer des entreprises du secteur technologique, biotechnologique, médical comme automobile : Motorola, Hyundai, Schneider et MEG, Honda, Novozymes, Servier Pharmaceutical, Alstom … Samsung, une des entreprises phares de TEDA, présente depuis 1993, y a installé 11 usines, dont neuf dans la zone économique.
Tianjin-Binhai se flatte d’avoir vu son PIB croître annuellement de plus de 20% depuis 12 ans, passant de 11,2 milliards de yuans en 1993 à quelque 160 milliards en 2005, « contre 200 milliards environ pour celui de Shanghai-Pudong« . En 2005, le PIB de Tianjin a atteint près de 46 milliards de dollars, contre 114 milliards de dollars à Shanghai, selon des chiffres officiels.