Louis Vuitton a décidé d’augmenter ses prix en Europe, pour inciter les Chinois à fréquenter en priorité les boutiques de l’Empire du milieu. Cette stratégie, destinée à asseoir la présence de la marque en Chine, peut-elle être payante ?

En août dernier, Louis Vuitton, la filiale du groupe LVMH, ainsi que d’autres groupes de luxe internationaux ont annoncé leur projet d’augmentation des prix de vente de leurs articles de luxe en Europe, afin de protéger le marché chinois. Prada devrait suivre, selon le porte-parole de la marque, dans hypothèse où l’euro continue à baisser, afin d’atténuer la différence de prix avec les articles vendus en Chine.
Deux mois plus tard, la décision, première du genre, de Louis Vuitton s’est concrétisée : sur le site internet français de la marque, plusieurs sacs classiques ont tous vu leur prix croître de 10 % environ. Après ajustement, la différence de prix avec les articles vendus en Chine est réduite d’approximativement 1.000 yuans. Et selon les responsables des ventes en Chine, cette augmentation des prix ne sera pas appliquée pour le moment sur le marché chinois.
Si Louis Vuitton augmente ses prix en France, et pas en Chine, s’agit-il d’une marque d’attention particulière envers les consommateurs chinois? En fait, pas vraiment.
Cette initiative des marques de luxe internationales a une explication : d’une part, touchés par la dépression économique, les consommateurs européens et américains de produits de luxe commencent à montrer des signes de lassitude ; d’autre part, les chiffres ont déjà montré maintes fois le potentiel de consommation des Chinois. Les unes après les autres, Louis Vuitton et les autres grandes marques internationales ont placé de grands espoirs dans le marché chinois, où elles ont massivement investi, en s’implantant dans les grandes métropoles, voire même dans les villes de deuxième et troisième catégories.
40 % des achats de luxe
Toutefois, ce qu’elles n’avaient pas prévu, c’est le manque de maturité des modes de consommation des Chinois. En effet, ils ne songent pas à sortir de chez eux pour aller consommer dans la boutique de luxe la plus proche, mais se précipitent en masse pour faire du shopping à l’étranger. Selon un rapport publié en octobre par le cabinet de conseil Bain sur le marché mondial du luxe, les consommateurs chinois ont acheté un quart des produits de luxe vendus dans le monde entier, le shopping des touristes représentant 40% de la consommation globale des produits de luxe.
L’appétit de consommation des Chinois en Europe et aux États Unis est désormais le verre de vin chaud dans le vent froid économique, mais dans le même temps, il signifie pour les marques de luxe qui ont investi en Chine une fuite des consommateurs. Sur ce marché, les performances n’atteignent pas les objectifs, voire même déclinent. Selon des données publiées, la croissance de Burberry dans la région Asie Pacifique a baissé à 16% cette année, alors qu’elle était de 67 % l’année dernière à pareille époque, la croissance en Chine ayant reculé de 30 à 15 % environ. Les ventes de Prada ont aussi faibli sur le marché chinois. Dans les régions de haute profitabilité apparaît ainsi une baisse des ventes, une tendance que chaque marque ne souhaite évidemment pas voir persister.
Pourquoi les Chinois aiment-ils autant consommer à l’étranger ? Les principales raisons de cette ruée vers le shopping sont les suivantes : le décalage de lancement des collections des marques de luxe qui entraîne un choix réduit d’articles pour les consommateurs chinois, le problème du service après-vente, et l’énorme différence de prix pour le même article entre l’Europe et la Chine.
« Plus c’est cher, mieux c’est »
Une fois identifié le nœud du problème, à savoir faire revenir les consommateurs sur le marché chinois, la méthode la plus simple est donc d’atténuer l’écart de prix. Baisser les prix en Chine? Cette mesure présenterait à l’évidence des risques, car elle impacterait non seulement les bénéfices, mais également causerait des dommages à l’image de la marque, car les consommateurs chinois sont persuadés que « plus c’est cher, mieux c’est ». Donc la seule solution est d’augmenter les prix en Europe. Ainsi peut-on faire d’une pierre deux coups, en maintenant le niveau des ventes et des bénéfices du côté chinois, tout en gagnant beaucoup d’argent pendant les soldes de fin d’année !
Louis Vuitton et d’autres marques de luxe procèdent donc pour la première fois à une augmentation des prix sur le marché français, en invoquant le taux de change, et cette augmentation est rapidement répercutée par les agences d’achat à l’étranger.
Les autres marques de luxe vont-elles suivre? Cela reste encore à voir. Mais selon des agences d’achat à l’étranger, Yves Saint Laurent, Céline, Chanel et d’autres marques auraient l’intention de pratiquer des hausses de prix en Europe à des degrés divers.
Cette hausse des prix des grandes marques sur le marché européen pourra-t-elle réellement faire revenir les consommateurs de luxe sur le marché chinois? Personnellement, je suis modérément optimiste.
Article du Nanfang Daily, traduit par Marie-Hélène Corbin
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Est-ce que quelqu’un a compris quelque chose à leur stratégie ?
J’ai rien pigé.
Je crois qu’il n’y a pas de stratégie. Augmentation du prix = augmentation de la marge et des bénéfices. Il y a peu de risque de voir s’effondrer les ventes car cette clientèle ne connait pas la crise.
La différence de prix avec la Chine sera maintenue, en effet, les chinois achètent hors TVA en France et omettent bien entendu de payer une taxe d’importation en Chine.
Amusant comme ce journaliste chinois considère que la Chine et les Chinois en visite en France sont les seuls marchés du luxe français. Quelle vision étroite du monde !
LVMH se contente de profiter de la baisse de l’euro pour augmenter ses marges. Airbus, qui vend ses avions en dollars, fait de même mais cela ne se remarque pas. Tout cela n’a rien que de très banal et je doute que les habitudes de consommation des clients chinois aient eu une importance majeure dans la stratégie marketing de LVMH.
C’est peu être aussi pour éviter le marche gris.
Les touristes chinois achètent hors taxes en France, et revendent avec un petit bénéfice en chine, ça peu permettre de payer un peu son voyage.